Sommaire
Introduction
Depuis déjà plusieurs années, je mûrissais le projet de partir sur les routes de France, seul, à la rencontre des Français. Dans mon sac à dos, des carnets et mon appareil photo.
En avril dernier, ce désir devint urgence ; une envie irraisonnée de communiquer, qu’une vie parisienne ne savait satisfaire, un besoin immodéré de renouer avec la nature, avec mes racines, avec mon enfance, me jetèrent sur les routes pour cent jours.
Le 13 avril, je quitte Paris… retour prévu le 22 juillet.
J’ai choisi le stop pour cette rencontre avec l’autre, cet homme ou cette femme avec qui je partagerai un court instant le même destin. Posté sur le bord de la route, je leur fais signe, ils passent leur chemin ou s’arrêtent. Quand ils m’accueillent, c’est souvent pour satisfaire leur besoin de communiquer, parler de l’immédiat, de ce qui les préoccupe, de ce qui les enchante, mais c’est aussi, très souvent, l’occasion d’un retour sur un passé que je n’ai pas connu, un passé qui leur pèse ou qu’ils chargent de tous les bonheurs. Je suis l’inconnu à qui l’on peut tout raconter, celui dont on ne craint ni le reproche, ni le sermon, celui dont on ne sollicite ni l’approbation, ni la critique ; simplement une oreille attentive.
Au fil des kilomètres parcourus et des rencontres, des discussions impromptues et des photographies, au fil des jours et des paysages, au fil des pages, j’ai tenté de dessiner les contours de la France des années 90, une France de fin de siècle en pleine mutation. Une galerie de “portraits-mosaïque”.
J’ai ainsi parcouru plus de 5.000 kilomètres à pied et en voiture, du nord au sud, de l’est à l’ouest d’une France en crise où les mots chômage, licenciement, jeunes sans emploi, désertification des campagnes, révolte paysanne, malaise des pêcheurs, riment avec désespoir, peur de l’avenir et de l’autre, repli sur soi ; mais d’une France qui sait aussi s’offrir, prolonger un dialogue parfois si fragile, une France qui se dévoile, humaine et sincère.